Un article d'opinion de Robin Barr, Global Lead, Development and Community & Indigenous rights à Earthworm Foundation
Le 9 août marque la Journée Internationale des Peuples Autochtones du Monde, qui commémore l’adoption en 2007de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA).
Tout au long de ma carrière, j'ai contribué à introduire la DNUDPA, l'OIT 169, les Principes Directeurs des Nations Unies sur les entreprises et les droits de l'homme (PDNU) et, plus important encore, les principes du Consentement Libre, Préalable et Eclairé (CLPE) (FPIC) auprès des dirigeants d'entreprise, explorant ensemble ce que ces principes signifient pour leurs opérations.
La majeure partie de ce travail a été réalisée avec des entreprises agroalimentaires, forestières et, plus récemment, minières, des investisseurs et même sur des projets de crédits carbone. Trop souvent, cela a été en réponse à un désaccord avec les populations locales (souvent autochtones). Cependant, à mesure que le travail évolue, il se concentre sur la prévention des conflits.
Plus récemment (et c'est la partie la plus intéressante), nous avons également commencé à établir des partenariats avec les peuples autochtones pour œuvrer ensemble à la protection de la biodiversité et combattre la crise climatique.
Il est prouvé par de nombreuses études que soutenir les droits autochtones sur la gestion des terres et des ressources est une des approches les plus efficaces pour protéger la biodiversité et lutter contre le changement climatique. Les entreprises ont un rôle majeur à jouer, avec de multiples avantages à la clé :
· Prévenir les conflits.
· Respecter les droits de l'Homme.
· Protéger la biodiversité.
· Réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES).
· Protéger les forêts.
· Innover.
Ce dernier point mérite que l’on s’y attarde. Les peuples autochtones détiennent une sagesse profonde de leurs environnements naturels, transmise de génération en génération. Pensez à la multitude de régions et d'écosystèmes impactés par les chaînes d'approvisionnement et les investissements des entreprises.
Dans chacune de ces régions, il existe probablement des communautés autochtones possédant un savoir précieux sur la diversité des valeurs et les meilleures pratiques de la gestion de leurs terres. Malheureusement, leurs connaissances et droits ont souvent été négligés. En reconnaissant l'importance de cette connexion autochtone avec la nature, des collaborations mutuellement bénéfiques entre les peuples locaux et les entreprises peuvent émerger.
Pour les entreprises qui se demandent ce qu'elles peuvent faire, voici quelques étapes concrètes pour commencer à promouvoir les droits des peuples autochtones et établir des partenariats solides:
- en particulier leurs droits à l'autodétermination, et à donner ou refuser leur Consentement Libre, Préalable et Eclairé (CLPE) aux projets qui les impactent.
Le CLPE est la pierre angulaire de l'engagement éthique avec les peuples autochtones, leur permettant d'avoir un véritable droit de regard sur les décisions impactant leurs terres et leurs moyens de subsistance. Adopter le CLPE démontre le respect, établit la confiance et favorise des partenariats à long terme avec les communautés autochtones. Le CLPE favorise une communication claire et permet d'analyser en profondeur les conséquences potentielles des activités de l'entreprise, garantissant ainsi que les projets correspondent aux aspirations et aux valeurs de la communauté locale.
Il est crucial que ces politiques englobent non seulement les opérations internes de l'entreprise, mais aussi ses fournisseurs et son portefeuille d'investissement. Lorsque les dirigeants d'entreprise entendent les acheteurs et les investisseurs insister sur l'importance du respect des droits fonciers et des ressources des peuples autochtones, cela a un impact majeur, surtout dans les régions où ces droits ne sont pas encore totalement reconnus.
Pour vous inspirer, vous pouvez consultez les politiques des droits de l'homme et d'approvisionnement responsable de ces multinationales :
· Norme d'approvisionnement responsable de Nestlé
· Politique d'approvisionnement en produits forestiers de 3M
· Guide de Mars pour les fournisseurs sur les droits fonciers
Soyons honnêtes – nous avons encore un long chemin à parcourir en ce qui concerne le respect des droits des peuples autochtones par les entreprises. Lorsqu'il y a des conflits, il peut être difficile de convaincre les fournisseurs ou les gestionnaires locaux de changer leurs méthodes de travail.
Dans de tels cas, j'ai constaté que l’établissement de relations directes avec les peuples autochtones permet aux acheteurs et aux investisseurs d'obtenir des perspectives concrètes sur ce qui doit changer pour améliorer une relation. Ces points peuvent ensuite être discutés directement avec les gestionnaires locaux pour faciliter le changement.
Un exemple que j'ai eu l'honneur de contribuer à développer est le partenariat entre les membres d'Earthworm, 3M, Nestlé, Mars et une Première Nation dans leur région d'approvisionnement en pâte et papier au Canada. Ce partenariat contribue à la protection d'importantes zones forestières.
La surveillance par les communautés elles-mêmes, qui consiste à prendre directement en compte les témoignages des personnes concernées, demeure la méthode la plus fiable pour évaluer l'impact de vos activités, ainsi que celles de vos fournisseurs, sur les habitants locaux. Pour vous orienter, les Principes de Surveillance Communautaire proposés par le Groupe Interlaken représentent une excellente référence.
Lorsque les entreprises, les gouvernements et les leaders des communautés privilégient la formation du personnel concernant les droits des peuples autochtones et les processus clés tels que le CLPE, la cartographie participative, la planification du développement communautaire et la résolution des conflits, ils peuvent rapidement adopter de nouvelles approches efficaces.
Le Centre of Social Excellence offre des sessions de formation sur ces thématiques en Afrique, en Indonésie et en Amérique latine. Ils organisent aussi des sessions de formation multi-acteurs adaptées à des contextes opérationnels précis, en rassemblant des représentants d'entreprises, des instances gouvernementales et des communautés, favorisant ainsi un dialogue ouvert et une co-construction de solutions.
Un exemple probant de leur action se trouve à Boké, zone minière essentielle de Guinée. Au Brésil, les formations du CSE sur le CLPE et la gestion sociale ont formé plus de 60 cadres des industries de la pâte à papier. Ces sessions jouent également un rôle crucial dans la sensibilisation à l'égard des droits traditionnels des communautés autochtones et afro-descendantes, notamment au sein des entreprises du secteur de l'huile de palme à Para.
Les entreprises désireuses de soutenir l'effort exceptionnel des peuples autochtones en matière de droits fonciers et de protection de la biodiversité disposent d'un large éventail d'options.
Le Forest Conservation Fund met en relation les entreprises et les consommateurs avec des projets de conservation à forte valeur ajoutée, tout en donnant aux communautés locales les moyens de protéger les forêts qu'elles gèrent. Ce fonds vise également à associer directement les entreprises aux initiatives de conservation liées à leurs zones d'approvisionnement.
Une autre alternative intéressante est l'initiative Community Land Rights and Conservation Finance Initiative (CLARIFI), pensée pour permettre aux détenteurs de droits, qu'ils soient autochtones ou issus de communautés, d'accéder à des financements. Ces fonds servent à étendre la cartographie et la reconnaissance officielle de leurs territoires, mais aussi à élaborer et mettre en place des stratégies favorisant la conservation, les moyens de subsistance, l'équité de genre et le développement selon leurs propres aspirations.
Enfin, en Amérique du Nord, le nouveau Tribal Lands Conservation Fund apporte un soutien direct aux initiatives autochtones axées sur la justice climatique et la préservation de l'environnement.
Pour approfondir le sujet, n'oubliez pas de noter dans vos agendas notre webinaire intitulé “How Companies, Indigenous Peoples and Local Communities are Partnering to Advance Human Rights and Conserve Nature” Des retours d'expérience vous permettront de découvrir des initiatives réussies où peuples autochtones, entreprises et communautés locales travaillent main dans la main pour garantir le respect des droits, lutter contre la déforestation, et veiller à la sauvegarde de la biodiversité.
À propos de Robin Barr, la responsable mondiale des droits des communautés et des peuples autochtones à la Earthworm Foundation.
Forte d'une expérience internationale de plus de 15 ans, Robin supervise les initiatives de droits communautaires et autochtones au sein de la fondation. Elle travaille en étroite collaboration avec des marques de renom, des transformateurs de matières premières et des producteurs à travers les chaînes d'approvisionnement pour promouvoir des méthodes de production éthiques et responsables. Sa spécialité réside dans la défense des droits de l'homme, la protection des forêts et la préservation des écosystèmes. Elle pilote également les initiatives du Centre de Social Excellence (CSE) et s'implique activement dans les formations et les partenariats relatifs aux droits humains. Ses responsabilités englobent également la garantie des droits fonciers et la gestion des relations avec les communautés, particulièrement en Afrique, en Amérique latine et en Asie du Sud-Est.
Robin s'intéresse à la manière dont la sagesse autochtone peut enrichir les efforts en matière d'environnement et de progrès social. Elle est diplômée de la Yale School of Forestry and Environmental Studies, où elle a obtenu une maîtrise en gestion environnementale.